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Séisme des Iles Tonga 19 Mars 2009

Un violent séisme de magnitude Mw7.8 s’est produit le 19 Mars 2009, à 18h17TU au niveau de la zone de subduction des iles Tonga. A grande échelle, la tectonique régionale est dominée par la convergence relative des plaques pacifique et australienne. La plaque Pacifique subducte vers l’ouest sous la plaque australienne au niveau de la fosse des Tonga, à une vitesse d’environ 77mm/an à la latitude de ce séisme. En termes de quantité de séismes et d’éruptions volcaniques, cette région dite de « l'Anneau de feu » est une des plus actives au monde.
Malgré la puissance du séisme, aucun dégât n’a été observé. Une alerte au tsunami a été rapidement lancée par le PTWC (Pacific Tsunami Warning Center) pour la région des îles Tonga, Niue, les îles Kermadec, les Samoa et les Fidji, puis levée quelques heures plus tard. Le laboratoire de géophysique de Pamatai, responsable du centre polynésien de prévention des tsunamis, a relevé de faibles élévations du niveau de la mer : 18 cm à Papeete et 20 cm à Nuku Hiva, l'île principale des Marquises. Aucun incident n'a été signalé mais à titre préventif, plusieurs établissements scolaires en bord de mer ont mis en place un dispositif d'évacuation. Les communes des archipels concernés avaient été averties, afin d'informer les personnes se trouvant à proximité du littoral et celles possédant des embarcations au mouillage.

Modélisation préliminaire de la source sismique

A partir des ondes de volume P et S enregistrées sur 14 stations large-bande distantes de 3000 à 10 000 km du séisme, on cherche à déterminer par inversion les caractéristiques statiques de la source sismique (mécanisme au foyer, profondeur et durée de la rupture), ainsi que certains paramètres cinématiques (amplitudes du glissement sur la faille, vitesse de rupture).

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 Figure 1 : Copie d’écran montrant une carte des 13 stations IRIS et de la station LDG large bande TAOE (Iles Marquises) qui ont été utilisées pour la détermination de source sismique.


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 Figure 2 : Modèle de rupture et comparaison des formes d’onde enregistrées (en noir) et simulées (en rouge) filtrées dans la bande [80s 15s]. Les ondes télésismiques SH sont représentées dans le cercle intérieur jaune sur une durée de 120s, et les ondes télésismiques P dans le cercle extérieur rouge sur une durée de 100s. A droite, on retrouve la répartition elliptique du glissement obtenu par la méthode des patchs.


Les paramètres géométriques obtenus sont cohérents avec la tectonique régionale : l’azimut, le pendage et le glissement de la faille (respectivement 201°, 49° et 96°) confirment un séisme de subduction inter-plaques, entre les plaques pacifique et australienne. Le glissement sur la faille (3m au maximum), son extension horizontale (entre 60 et 100km) et sa relative profondeur (environ 50km) justifie au premier ordre qu’aucun tsunami majeur n’a été généré. Malgré la bonne adéquation entre les signaux enregistrés et les formes d’ondes synthétiques pour le modèle présenté ci-dessus, le pendage de la faille et la profondeur du glissement trouvés dans cette inversion semblent peu cohérents avec la latitude et la longitude de l’hypocentre (se manifestant sur la figure suivante par une position de la trace de la faille en surface à l’est de la fosse). En effet, pour une distance à la fosse d’une vingtaine de kilomètres, la sismicité historique suggèrerait un (pendage ?) de 15-20 degrés et une profondeur inférieure à 20km. La figure suivante montre la localisation du glissement, sur le logiciel de cartographie Google Earth.

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 Figure 3 : Distribution du glissement et répartition des répliques dont la magnitude est supérieure à 4.5 (USGS). La zone des répliques est assez cohérente avec la zone de glissement calculée, aux incertitudes de localisation près.


Modélisation du déplacement induit en surface

A partir du déplacement trouvé sur la faille, on estime le déplacement induit en surface en utilisant la formulation de Okada (1985) pour un demi-espace élastique homogène. Le maximum de déplacement vertical atteint environ 40cm, ce qui explique pourquoi le tsunami généré a été très faible (voir Figure 7)

 
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 Figure 4 : Distribution du déplacement vertical statique du sol, dans une région de 200km autour du séisme. L’échelle de couleur du bas code le déplacement sur la faille alors que celle du haut code les déplacements verticaux du sol. A la verticale du séisme, les fonds sous marins se sont soulevés de moins de 50cm.

Calcul des temps d’arrivée du tsunami

On calcule et représente les temps d’arrivée théoriques du tsunami, à l’aide du code ttt (Tsunami Travel Time développé par le Dr. Paul Wessel, http://www.geoware-online.com) et de GMT (Generic Mapping Tools developpé par les Drs. Paul Wessel et Walter Smith, http://gmt.soest.hawaii.edu).
La figure 7 montre les enregistrements marégraphiques suite au passage du tsunami. La hauteur de vague maximum enregistrée est ici de 20cm à Nuku Hiva aux Marquises.

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 Figure 5 : Temps de propagation du tsunami dans une région de 8000km à l’est du séisme, direction dans laquelle les vagues générées seraient les plus fortes. Les triangles rouges représentent les bouées DART du Pacifique sud.


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 Figure 6 : Sources sismiques, répliques, stations et propagation du tsunami. Tahiti se trouve à 1800km de l’épicentre, le temps de propagation estimé de la vague est de 3h30. Les stations LDG et IRIS représentées sur cette figure ont été utilisées pour l’inversion.


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 Figure 7 : Exemples de marégraphes enregistrés suite au séisme. On y observe le tsunami d’une hauteur de quelques centimètres à 20cm aux heures théoriques attendues.