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Séisme de magnitude 8,7 à l'ouest des côtes de Sumatra

Un séisme de magnitude Mw 8.7 a eu lieu mercredi 11 Avril 2012 à 8h38 Temps Universel (14h38 heure locale, 10h38 heure de Paris).  Deux heures après ce séisme de magnitude importante, une réplique de magnitude Mw8.2  a également été enregistrée. Dans les cinq heures suivant le choc principal, 21 répliques de magnitude supérieure à  5.0 ont été détectées et localisées (figure 2).

Magnitude

Mw 8.7

Region

En mer, à l’Ouest des côtes de Sumatra

Date

11 Avril 2012

Heure

08:38:35.0 UTC (14h38 heure locale)

Localisation

2.34 Nord (latitude) ; 93.16 Est (Longitude)

Profondeur

10 km

Villes les plus
proches

Ville de Banda Aceh à 430 km (Nord Sumatra, Indonésie)
Ville de Meulaboh à 385 km  (Nord Sumatra, Indonésie)

La figure ci-dessous (figure 1) montre la sismicité historique de la région ainsi que les 2 séismes importants du 11 avril 2012.

Carte de la sismicité historique de la zone Nord-Est de l’Océan Indien et du Nord Sumatra.
 Figure 1 : Carte de la sismicité historique de la zone Nord-Est de l’Océan Indien et du Nord Sumatra.

Carte préliminaire des répliques du 11 Avril 2012 à 15h00 UTC (information disponible en temps réel au Centre de Sismologie Euro-Méditerranéen)
 Figure 2 : Carte préliminaire des répliques du 11 Avril 2012 à 15h00 UTC (information disponible en temps réel au Centre de Sismologie Euro-Méditerranéen http://www.emsc-csem.org/Earthquake/208/Mw-8-7-OFF-W-COAST-OF-NORTHERN-SUMATRA-on-April-11th-2012-at-08-38-UTC ).

Dans l’heure qui a suivi le séisme, le CEA (Département Analyse Surveillance Environnement) a été en mesure de fournir un mécanisme de rupture indiquant que ce séisme présentait un faible potentiel tsunamigène : il s’agit d’un mouvement horizontal de décrochement pour lequel les masses d’eau mises en mouvement sont limitées. Un tsunami de faible amplitude a effectivement été généré. Dans les zones atteintes par le tsunami, les mesures d’élévation du niveau de la mer sont de quelques dizaines de centimètres jusqu’à 1 mètre localement sur les côtes indonésiennes. La figure suivante montre une simulation de la propagation du tsunami.

Animation de la propagation du tsunami dans l’Océan Indien (source CEA/DAM).
Hauteurs maximales après 8 h de propagation (source CEA/DAM).
 Figure 3 : En haut, animation de la propagation du tsunami dans l’Océan Indien. En bas, hauteurs maximales après 8 h de propagation (source CEA/DAM).

Les figures suivantes montrent l’estimation des temps de trajet du tsunami généré en référence à l’heure du séisme principal (figure 4) ainsi que la mesure du marégraphe de l’île Coco située entre l’Australie et l’Indonésie (figure 5).

Carte des temps de propagation du tsunami à travers l’Océan Indien en considérant le modèle de faille comme une ligne de points de source (source CEA/DAM, simulation réalisée avec le logiciel TTT (GeoWare).
 Figure 4 : Carte des temps de propagation du tsunami à travers l’Océan Indien en considérant le modèle de faille comme une ligne de points de source (source CEA/DAM, simulation réalisée avec le logiciel TTT (GeoWare).

Enregistrement marégraphique sur l’île de Coco (Océan Indien). Le tsunami est effectivement mesuré, son amplitude est d’environ 20 cm.
 Figure 5 : Enregistrement marégraphique sur l’île de Coco (Océan Indien). Le tsunami est effectivement mesuré, son amplitude est d’environ 20 cm.

Résultats préliminaires de l’étude de la source sismique

La source du séisme principal a été analysée en essayant d’expliquer au mieux les signaux enregistrés à grande distance sur les stations sismiques des réseaux mondiaux (IRIS et CEA). Ce travail, appelé également inversion cinématique, permet de décrire finement la source sismique, c'est-à-dire comment la rupture s’est propagée sur la faille (méthode des patchs ; Vallée M. and Bouchon M. : Imaging co-seismic rupture in far-field by slip patches, JGI, 2004). Ce travail est important car il permet, outre de confirmer la magnitude, de fournir des dimensions caractéristiques de longueur, de durée et de glissement nécessaires pour comprendre et simuler un tsunami potentiel. Pour ce travail, nous reconstituons les déplacements des ondes sismiques de pression (P) et de cisaillement (SH) afin de mieux contraindre la source sismique.

Inversion du séisme du 11 Avril 2012 à 8h38 UTCGlissement du séisme du 11 Avril 2012 à 8h38 UTC


 Figure 6 : Inversion du séisme du 11 Avril 2012 à 8h38 UTC. Les résultats conduisent à une source de magnitude 8.7 avec deux zones de rupture dont la principale, au niveau de l’hypocentre, possède un glissement maximal d’au moins 9 mètres (source CEA/DAM).

L'inversion cinématique utilisant les données longue-période (CEA et IRIS) de capteurs sismiques conduit à un mécanisme au foyer en faille décrochante avec une magnitude Mw=8.7 et une profondeur épicentrale de 22 km (figure 6). La rupture est constituée de deux patchs de glissement. Le patch principal se situe au niveau de l’hypocentre et présente une rupture bilatérale (rupture au Nord et au Sud par rapport à l’hypocentre). La durée de la rupture est d’environ 120 secondes. Le glissement maximal d’au moins 9 mètres s’est produit principalement au niveau de l’hypocentre. Des résultats similaires sont obtenus par d’autres organismes ( https://geoazur.oca.eu/spip.php?rubrique787).


Analyse sismotectonique préliminaire

Les deux séismes majeurs de magnitude Mw 8.7 et Mw 8.2 qui se sont produits dans le nord-est de l'Océan Indien le 11 avril 2012, bien que situés dans la région des grands séismes de 2004 (Sumatra-Andaman Mw 9.2) et 2005 (Nias, Mw 8.7), présentent des mécanismes très différents, décrochants, liés à un contexte tectonique particulier.
Les observations sismologiques ont en effet montré qu'il existe dans le nord-est de l'Océan Indien, loin des frontières de plaques de type subduction (Sumatra-Java) ou dorsales en extension, une sismicité intraplaque importante (Figure 7), assimilable à une frontière de plaque diffuse (Robinson et al., 2001 ; De Mets et al., 2005). C'est le cas notamment dans le Bassin de Wharton (W sur la figure 7) qui se situe à l'est de la ride 90E et au sud-ouest de la fosse de Sumatra-Java.
Cette déformation diffuse se produit en réponse au régime particulier de contraintes compressives hérité de la collision Inde-Asie (65 Ma), qui déforme toujours à l'arrière les plaques océaniques, selon des régimes assez différents à l'ouest et à l'est de la ride 90E. Dans le Bassin de Wharton, des données géophysiques récentes ont effectivement confirmé l'activité tectonique de grandes failles décrochantes (Deplus et al., 1998 ; Robinson et al., 2001). Les anciennes zones de fracture héritées de l'accrétion océanique passée (cessée il y a moins de 45 Ma) (Singh et al., 2011, figure 8) sont réactivées selon un mouvement décrochant senestre, qui a produit par exemple le séisme de 2000 (Robinson et al., 2001) (figure 7). C'est dans ce contexte similaire, au nord du Bassin de Wharton, que s'est produit le séisme du 11 avril 2012 (Mw 8.7), suivi 2 heures après d'une seconde rupture plus au sud (Mw 8.2), selon un plan principal pratiquement nord-sud dans les deux cas (figure 8).

Sismicité intraplaque connue depuis 1904 dans le Bassin de Wharton

 Figure 7 : Sismicité intraplaque connue depuis 1904 dans le Bassin de Wharton. Le mécanisme en rouge montre le séisme décrochant de 2000 (Mw 7.8). La rupture du 11 avril 2012 est représentée par l'étoile orange (adapté de Robinson et al., 2001).

Bathymétrie et anomalies magnétiques dans le Bassin de Wharton. Les ruptures Mw 8.7 et Mw 8.2 se situent dans le nord du Bassin, proches d'une ancienne zone de fracture réactivée (adapté de Singh et al., 2011).
 Figure 8 : Bathymétrie et anomalies magnétiques dans le Bassin de Wharton. Les ruptures Mw 8.7 et Mw 8.2 se situent dans le nord du Bassin, proches d'une ancienne zone de fracture réactivée (adapté de Singh et al., 2011).


REFERENCES :
 
De Mets, C., R.G. Gordon, J.-Y. Royer, Motion between the Indian, Capricorn and Somalian plates since 20 Ma: implications for the timing and magnitude of distributed lithospheric deformation in the equatorial Indian ocean, Geophysical Journal International, 161, 445-468, 2005.
  Deplus, C., M. Diament, H. Hébert, G. Bertrand, S. Dominguez, J. Dubois, J. Malod, P. Patriat, B. Pontoise, et J.-J. Sibilla, Direct evidence of active deformation in the eastern Indian oceanic plate, Geology, 26, 2, 131-134, 1998.
  Robinson, D.,P., C. Henry, S. Das et J.H. Woodhouse, Simultaneous rupture along two conjugate planes of the Wharton Basin earthquake, Science, 292, 1145-1148, 2001.
  Singh, S., H. Carton, A.S. Chauhan, S. Androvandi, A. Davaille, J. Dyment, M. Cannat et N.D. Hananto, Extremely thin crust in the Indian Ocean possibly resulting from Plume–Ridge Interaction, Geophysical Journal International, 184, 29-42, 2011.
 

Vallée M. and Bouchon M. , Imaging co-seismic rupture in far-field by slip patches, Geophysical Journal International, 2004

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